Elle est incontournable dans le paysage de l’art déco : la Villa Empain.

Nous avons vu précédemment comment Louis, le second fils du mythique et richissime baron Edouard Empain, avait tenté une aventure architecturale au Québec, en y construisant un centre de loisirs révolutionnaire.
Féru d’architecture, Louis l’est depuis son plus jeune âge : il a souvent eu de longues conversations sur le sujet avec son père et il a côtoyé bon nombre d’architectes (ceux-ci, voulant développer dans les Années folles le caractère international de leur carrière, fréquentaient souvent le monde des affaires). Appréciant l’art déco, il s’intéresse également au courant moderniste du Bauhaus.
C’est dans ce contexte, alors qu’il n’a encore que 22 ans, qu’il rencontre l’architecte suisse Michel Polak, figure bien connue de l’art déco bruxellois auquel on doit notamment de nombreux hôtels et les Galeries Anspach. Polak développe de grands espaces dans un style luxueux mais classique, y mêlant une influence de la Sécession viennoise. Empain s’entend bien avec lui et lui confie les projets de construction d’une villa à Bruxelles le long de l’avenue Franklin Roosevelt, en bordure du bois de la Cambre. La réalisation s’étend de 1931 à 1934.


Mais en 1934, Louis a déjà tourné la page de l’art déco, il lui préfère un modernisme plus radical et surtout, il s’est lancé dans l’aventure canadienne. La villa ne l’intéresse plus.
Il ne l’habitera donc jamais.
Il la cèdera à l’État belge dès 1937 avec la condition expresse qu’elle devienne exclusivement un musée : le Musée Royal des Arts décoratifs contemporains, lié à l’école de la Cambre, et sous la houlette d’une fondation Louis Empain. La guerre met fin à ce projet, la villa étant occupée par l’armée allemande en novembre 1943.
Commence alors une série de tribulations: à la fin de la guerre, le ministre Paul-Henri Spaak, niant toutes les clauses de la donation, y installe l’ambassade d’URSS. Louis se rebiffe, récupère sa villa et y présente des expositions d’art contemporain. Puis il la vend à un industriel arménien du tabac qui, lui même, la loue à la chaîne RTL jusqu’à la fin des années 1980.

Pauvre villa ainsi ballottée! Elle n’est pourtant pas au bout de ses peines, bien au contraire. Le vrai chemin de croix commence : abandonnée, en partie détruite et vandalisée, pillée malgré son inscription à la liste du patrimoine bruxellois à protéger en 2001. La fondation Boghossian la récupère en 2006 et entame une restauration complète jusqu’en 2010.





En 2011, la Fondation Boghossian reçoit le prix Europa Nostra pour le caractère exemplaire de la restauration. Depuis, la villa Empain est devenue le Centre d’art et de dialogue entre les cultures d’Orient et d’Occident, où la Fondation organise des rencontres culturelles et des expositions d’art contemporain.
Les matériaux employés sont raffinés: du granit poli sur les façades, des cornières en laiton dorées à la feuille d’or, des marbres d’Escalette et de Bois Jourdan, du bois de Palu moiré des Indes, du Manilkara du Venezuela, des panneaux de ronce de Bubinga poli, du noyer et sa loupe, du palissandre et du chêne, des ferronneries, des vitraux, des mosaïques… sur quatre étages.




Lors de notre visite, nous avons eu de la chance : la villa, ordinairement vide et d’un blanc uniforme propice aux expositions d’art contemporain, voyait ses murs tapissés de somptueux papiers peints et était meublée sur deux étages à l’aide de meubles, de tapis, de tableaux, d’objets de design qu’aurait pu choisir Louis Empain s’il s’y était installé… un spectacle absolument fabuleux, « flamboyant »!


Cette maison l’a bien mérité : elle a été ressuscitée, elle devient vivante!
Partons à sa découverte !
Il est, comme toujours, possible de voir « en grand » les photos en cliquant sur chacune d’elles. Sur les plans, figurent les noms des artistes dont les oeuvres meublent les différentes pièces.
Deux étages pouvaient être visités : le rez-de-chaussée et le 1er étage. Passé le couloir de l’entrée, on découvre l’immense salon de musique (n°1 sur le plan) puis toujours en avançant, on découvre la célèbre piscine….






On pivote à droite, la salle à manger (n°2) ; à gauche, le grand salon (n°3). Ambiance cossue, précieuse avec des meubles juste sublimes. La lumière baigne l’ensemble.






Revenant vers le salon de musique, on accède alors au 1er étage.

Une chambre d’enfant (n°1) et une chambre à coucher (n°5)





Le fumoir de l’oasis (n°2) et le bureau de monsieur (n°4)






Le boudoir (n°6), le salon intime (n°7). On y trouve aussi un dressing et une salle de bain.






Les pièces sont organisées autour du fameux atrium surplombant le salon de musique. Retour au rez-de-chaussée par une élégante cage d’escalier.





Revenues au rez-de-chaussée, il nous reste à découvrir le jardin qui est constitué d’une simple pergola et de la célèbre piscine…


Un petit tour au café et à la boutique.



On sort de la villa Empain éblouies mais mises un peu KO par une certaine grandiloquence du traitement de l’espace. Nulle intimité, un sublime décor. Nous avions visité la maison Buuren le matin, deux mondes complètement opposés!
Très intéressant surtout après l’avoir visitée nous-mêmes ! Très belle photos de ce magnifique mobilier.
Nous n’avions pas eu la chance – comme toi – d’y rencontrer une bien jolie baronne😊 qui a dû être un peu déçue si l’exposition sur Heliopolis n’était plus accessible en sous-sol comme elle l’était en été 2019…
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Hélas, non, nous l’avons visitée en septembre. Mais la jolie baronne avait tout de même acheté un superbe livre racontant cette aventure abracadabrantesque! Merci, cher José, de m’avoir lue et d’avoir commenté!
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C’est toujours un vrai plaisir de te lire 🤗
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Comment rester de marbre devant la magnificence de cette villa Art-déco érigée à Bruxelles pour Louis Empain fils cadet d’Edouard Empain ,décédé le 21 juillet 1929. Dès l’automne 1929, les 2 fils se retrouvent à la tête d’un immense empire ,héritage d’un père multimilliardaires .
Si Jean ,l’aîné est un extravagant aimant cette vie de luxe , Louis , lui devient de plus en plus austère , préférant une solidarité entre le monde financier et le monde ouvrier .Et je trouve paradoxal , la construction de ce luxueux hôtel particulier vu son tempérament et ses prises de position ! On connaît peu de choses à propos de cette villa sauf qu’ elle aurait été peu habitée par son propriétaire , être assez solitaire et chaste .
Merci à la Fondation Boghossian pour la restauration complète de cette superbe propriété comprenant également une pergola et une piscine , une des premières privées en Belgique . Grâce à cette exposition » Flamboyant » , on a pu se replonger dans le monde de Louis ( construction entre 1930 et 1934) et admirer ce chef- d’oeuvre : d’un côté le luxe des matériaux utilisés ( certains bois exotiques jamais entendus) avec des détails chers à l’Art-déco et de l’autre , une architecture moderniste avec des lignes simples et symétriques sans fioritures excessives .Tout est d’un raffinement extrême , les détails sont soignés ; tapisseries , tableaux , vaisselles et ameublement devaient être dans la même veine .
Cette visite m’a époustouflée par un rez-de-chaussée gigantesque avec son majestueux hall central baigné d’une douce lumière provenant de l’immense fenêtre donnant sur la piscine. Les diverses pièces attenantes ont chacune leur charme et j’imagine le Baron Louis dans son bureau , aujourd’hui ,affecté à la boutique de la fondation Boghossian . Le 1er étage est tout aussi somptueux : chambres , salles de bain , fumoir , bureau de Monsieur , salle d’escrime sont décorés et meublés selon leur affectation propre .
Le sous-sol que nous n’avons pu visiter , était l’espace autrefois affecté aux cuisines et à l’office .
Comment détacher son regard de cette Villa monumentale de par sa construction et par le luxe inouï des différentes pièces , des murs , de la cage d’escalier , du jardin avec sa pergola et sa piscine conçue comme un miroir d’eau ….Tout est « flamboyant » de beauté mais construit pour un homme célibataire qui avait déjà d’autres plans en tête : construire tout un ensemble durable au Canada comme son père l’avait fait à Héliopolis ……
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La rénovation a été exemplaire et d’ailleurs récompensée par Europa Nostra. Et voir cette villa meublée avec tant de soin, c’était un plaisir incommensurable! Je pense que nous aurions la même impression à la villa Cavrois que l’association remeuble petit à petit (mais là définitivement) en traquant partout dans le monde le mobilier et les objets éparpillés, ou leurs copies à l’identique… merci pour ce beau commentaire, ma gente dame!
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