Quarante, oui. Je viens d’effectuer ma quarantième rentrée scolaire en tant que professeur et ça me donne un peu le vertige. Combien d’élèves ai-je vus s’installer devant moi?
Lundi matin, je me suis levée avec un drôle de sentiment au coeur : cette rentrée aurait dû être la dernière, celle que nous attendions avec gourmandise, mon mari et moi, en nous réjouissant du prochain été en Provence qui serait long, long, long! Plus besoin de partir et de rentrer comme tout le monde quand Bisons Futé voit rouge ou noir. On y serait restés jusqu’aux vendanges au moins ! Alors j’aurais préparé ma mallette, mon journal de classe, les copies de mes élèves avec un peu de nostalgie tout de même, comme il se doit lors de cette ultime étape qui m’aurait conduite à la retraite dix mois plus tard. Oui, j’aurais été émue de cet instant.
Mais le scénario a changé et me voilà bien obligée d’envisager un nouveau projet de vie future. L’émotion, ce lundi matin, était autre : j’allais faire cette quarantième rentrée après une longue parenthèse douloureuse et l’abandon de ce rêve de bonheur à deux.
Et il y en aura une quarante et unième, peut-être même une quarante-deuxième.
J’ai passé mon été à remettre de l’ordre dans ma tête et dans la maison. J’ai tâché vaille que vaille de me fixer de nouveaux objectifs personnels et de repenser l’organisation de ma vie et de ma maison. Nous l’avions un peu délaissée, imaginant passer le plus clair de notre temps sous le soleil. Alors de grands travaux de rénovation s’imposent maintenant. Pour les mener à bien, il me faut travailler un peu plus longtemps. Donc je rempile !
J’avais pensé vivre cette dernière année scolaire avec mon « vieux » matériel. Eh bien, puisque j’ai encore deux bonnes années devant moi, j’ai fait comme les bons élèves : une nouvelle mallette, de nouveaux classeurs, un nouveau stylo… et j’ai même commencé à redonner un coup de jeune à mes cours, ce que je faisais chaque été, attablée à l’ombre des chênes provençaux sous le regard ahuri de ma voisine qui « ne savait pas qu’un prof travaillait autant pendant ses vacances »… Pour le dernier round, je m’étais dit que mes préparations de l’an dernier feraient bien l’affaire. Mais voilà, j’ai encore quelques idées de leçons qui me trottent dans la tête. Pourquoi me priver de les réaliser ? S’il faut rempiler, que ce soit dans l’enthousiasme !
Après cinq mois de pause, je savais en me levant ce matin qu’il y aurait des élèves qui m’attendraient au coin du bois avec un joyeux « Bonjour M’dame!, vous allez bien? » et des collègues qui m’accueilleraient avec une chaleureuse accolade. J’allais même en retrouver deux qui, depuis mon absence, étaient devenues mamans. La vie continue, heureusement.
Pardon donc à mes lecteurs d’être restée silencieuse une bonne semaine mais il m’a fallu remettre tous mes cours en ordre, et puis le métier de prof étant très physique – je déteste rester assise – je suis allée tous les soirs dormir avec les poules, question de récupération sportive!
Vous êtes pardonnée, M’dame! Tant mieux pour les élèves si tu rempiles…Tant mieux aussi pour celle qui,chargée d’écrire un discours pour ta retraite, se demande comment elle pourra être un jour à la hauteur de cet honneur… Et bravo pour ta volonté de donner à ce stade de ta carrière « un coup de jeune » à tes cours qui (je peux en témoigner) n’ont jamais senti la naphtaline… Je finissais par l’oublier, mais tu fais bien de signaler à quel point le métier de prof est très physique… Bon vent dans cette nouvelle année scolaire et vivement de nouveaux billets…
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Contrairement à l’idée préconçue d’une majorité de nos concitoyens qui pensent que les enseignants sont privilégiés par le « formidable horaire des vacances », je crois qu’ils sont effectivement privilégiés, mais par la chance inouïe de rester jeunes.
Le contact de ces ados, tous identiques et tous différents, doit être pour vous comme une fontaine de jouvence.
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