Stupeur et ravissements

808858_1.jpgCe premier concours de chefs d’orchestre d’opéra à Liège a tenu presque toutes ses promesses : il y a eu le plaisir de la musique, l’entrain de la compétition et l’émotion de la découverte de jeunes talents.

Et même plus pour certains Liégeois qui s’étaient convertis en « familles d’accueil » et qui, selon les conversations que nous partageâmes, avaient tissé des liens d’amitié et même d’affection (on n’est pas en Cité ardente pour rien) avec leurs candidats vite devenus leurs petits « poyons » et eux, supporters dignes de ceux du Standard. 

 

 

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Il y eut 140 candidats, 50 retenus et 44 qui se présentèrent aux éliminatoires avec piano devant le jury et le public. 

Nous avons pris le train en marche au stade des quarts de finale (mardi, une après-midi et une soirée pour entendre 8 participants équipés de micros qui avaient droit à une demi-heure de travail avec l’orchestre et les solistes, et parfois les chœurs). Les œuvres imposées: Carmen et La Bohème. Ils devaient en rester 6 et le choix du jury convint au public.

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De gauche à droite: Antoine Glatard, Michele Spotti, Lee Mills, Andrea Gasperin, Leonardo Sini, Pierre Dumoussaud. 

Pour la demi-finale, chacun a eu droit, sous nos yeux et nos oreilles,  à une heure de travail sur un acte complet des mêmes œuvres auxquelles on ajoute Falstaff… Pas une mince affaire! Le stress monte, il n’en restera que trois…

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Ah, on se régale mercredi et jeudi! On entre dans la cuisine intime de la création orchestrale, et après les avoir vus être passés à la moulinette, on a quatre chouchous. Aïe, un de trop!  Choix du jury qui a trouvé un juste équilibre: un Italien, un Français et un diplômé du Conservatoire (flamand) de Bruxelles. On est un peu déçues car on aimait beaucoup Gasperin dont la fugue du dernier acte de Falstaff fut d’une maîtrise absolue. L’orchestre aussi, paraît-il… Mais qu’importe, rien que du pur RAVISSEMENT depuis le début avec ces jeunes qui en veulent! Restent Antoine Glatard, Michele Spotti et Pierre Dumoussaud. 

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Le vendredi, c’est relâche pour nous, pas pour eux. Séances intenses de répétitions car en finale,  il faudra interpréter un acte entier sans interruption, dans les conditions d’un spectacle. C’est aussi le jour où la rumeur enfle, alimentée par le président du jury lui-même à la radio: le jury se réserve le droit de ne pas attribuer le premier prix mais de proposer des ex-aequo pour le deuxième… Samedi soir lors de la présentation d’avant-concert, Musiq3 remet le couvert : peut-être pas de premier prix.

STUPEUR, on sent que c’est cuit. 

Moi, j’imagine les 3 jeunes en coulisses qui ont compris qu’ils se battent pour les accessits. Mais ils seront professionnels jusqu’au bout et ne ménageront pas leur peine pour fournir d’excellentes prestations.

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Michele Spotti organise des conversations époustouflantes dans les deux tableaux de l’acte 1 de Falstaff, Antoine Glatard gère le Café Momus de La Bohème et Pierre Dumoussaud règle en architecte son compte à Carmen parmi des merveilles.

Le palmarès: Pierre Dumoussaud et Michele Spotti, deuxièmes prix ex-aequo et Antoine Glattard, troisième prix.

Il tombe un peu dans l’indifférence et avec quelques « hou, hou » du public. Les belles paroles de Mazzonis sonnent creux. Dommage, quel dommage! Pas loin du gâchis de talents.

Certes Dumoussaud et Spotti étaient au coude à coude artistiquement parlant et peut-être que le budget ne permettait pas deux prix à dix mille euros ; deux deuxièmes prix à 4 mille euros, on restait dans les marges. Mais quid du concert que le gagnant devait diriger en mars prochain? Pourquoi pas les inviter tous les deux? L’essentiel pour de jeunes artistes, c’est de se produire, de se faire entendre.

Certes. Certes, on en est à la première édition et tout est perfectible. L’orchestre a eu droit au chapitre dans le vote final mais pas le public, pourtant très nombreux et enthousiaste dès les éliminatoires… Même le CMIREB se trouve parfois dans une impasse avec sa session de violoncelle pendant laquelle on a trop entendu les mêmes œuvres. Espérons que pour sa deuxième édition dans le cadre des 200 ans de l’Opéra de Liège, ce concours des chefs d’orchestre d’opéra aura vaincu ses maladies de jeunesse.

Ce qui nous reste en travers de gorge, nous le public fervent, c’est le pré-palmarès étalé dans les média. Quelle maladresse! Que les deux lauréats soient difficiles à départager, c’et sûr, qu’ils soient ex-aequo, ok, mais qu’on l’annonce avant la finale, pfuuu… Mazzonis, tu nous gonfles grave!

Mais il faut au-delà de tout rendre hommage à l’orchestre et aux solistes (réunis au balcon lors de la proclamation et longuement applaudis, grâce leur soit rendue pour leur patience et leur talent) qui se plièrent à toutes les volontés des candidats, ainsi qu’au chœur et à la maîtrise, les petits chouchous qui assurèrent.  

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Une semaine après, l’amertume s’estompe un peu  et fait place à l’enthousiasme et à un nouveau RAVISSEMENT: le concert d’été sous la direction de Speranza Scappucci, notre nouvelle cheffe principale attitrée.

Vous faire entendre du neuf dans des extraits que vous connaissez depuis 50 ans, vous émouvoir par la gestuelle, vous  fasciner par la précision et la volonté de tirer le meilleur des chefs de pupitre, quels moments! Merci au maestro Arrivabeni d’avoir amené, au fil des années, l’orchestre à un tel niveau ; merci à Speranza de lui avoir donné en si peu de temps le sourire et un coup de peps, la banane, quoi! Quel enthousiasme du public conquis, et après le spectacle sur le trottoir de la sortie des artistes, un goût de bonheur ! Le début d’une grande histoire d’amour avec l’ORW et son public chaud, chaud de chaud!

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Speranza nous avait régalés dans Jérusalem et à l’époque quand il s’agissait de trouver un nouveau directeur musical, j’avais espéré…  Exaucée, j’attends le meilleur de cette merveilleuse musicienne tellement accessible à son public, tout ce qu’on aime à Liège! 

2 commentaires sur “Stupeur et ravissements

  1. J’avais aussi été assez surpris de ces déclarations préalables à la prestation en finale. Comment anticiper qu’aucun de 3 candidats ne pourrait réaliser LA performance attendue en phase final pour mériter LE prix ? Bon, sans avoir assisté aux épreuves, je ne suis certainement pas le mieux placé pour juger mais je comprends les frustrations. Le règlement du CMIREB, quoique souvent décrié, à – au moins – le mérite d’éviter ce type de palmarès.

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  2. Découverte de ce concours organisé par ORW et grand plaisir d’ écoute de tous ces jeunes chefs face à leur immense défi : celui de diriger un orchestre avec chœurs et maitrise , empli de leur connaissance musicale , leur fougue mais aussi leur trac .
    D’emblée ,me suis plongée avec ravissement , dans la répétition de leur œuvre respective , et , ai tremblé au fil des jours de leur prestation et des éliminatoires .Mais stupeur , si la finale fut magnifique ,que dire de ces 2 deuxièmes ex-aequo , programmés deux jours auparavant ….Belle victoire pour ces 3 jeunes lauréats mais qui me laisse un goût amer devant un tel jugement , un manque de tact profond envers ces jeunes . Aucun n’aura le mérite de diriger ce bel orchestre en mars 2018….choix délibéré du jury ?? Année 2020 : un grand crû enfin ?
    Régal cependant une semaine plus tard , avec ce concerto d’été dirigé par une jeune cheffe pleine de maestria . Sperenza , on t’aime et on se réjouit de te retrouver bientôt avec  » Manon de Puccini » .

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