Montagnes de beautés (1)

La montagne est belle en soi, sans doute est-ce pour cela qu’on n’y trouve pas beaucoup de monuments artistiques remarquables. Des forteresses dues à Vauban, des abbayes et monastères au creux des vallées et c’est à peu près tout. Oui, difficile de concurrencer la majesté du Mont Blanc…

Et pourtant ! Grâce à Jean-Christophe Rufin que a emmené Nathalie Schraen Guirma et son van « Sur la route mythique du Mont Blanc », une merveille artistique s’est offerte à nous.

Elle se trouve au centre d’un triangle imaginaire : Saint-Gervais et son célèbre tramway du Mont Blanc qui amène les alpinistes au pied de la voie normale par l’aiguille du Goûter, Flaine et son désert de Platé, le plus grand lapiaz de France zébré de failles, crevasses et d’incroyables fossiles compressés dans ces roches dolomitiques et Passy avec son lac vert, joyau aux algues bleues et vertes.

La commune de Passy par son air pur devient dans les années 20/30 une station climatique spécialisée dans le traitement de la tuberculose. Sur le plateau d’Assy, les collines se peuplent de sanatoriums parfois au look du Potala de Lhassa. En 1970, une coulée de boue fait malheureusement de nombreuses victimes parmi des enfants venus en centre aéré. Aujourd’hui, tous ces bâtiments se sont reconvertis en centres de cure ultra-modernes.

Ce passé de station sanatoriale explique la présence de notre joyau.

Il y fallait à l’époque un lieu de culte.

Le chanoine Jean Devémy, aumonier du sanatorium de Sancellemoz, est chargé de la chose.

Ce sera l’église Notre-Dame de Toute Grâce.

Il confie l’architecture à Maurice Novarina qui s’inspire des chalets savoyards : piliers massifs, pierre du pays, bois d’épicéa, clocher de 28m qui élève le regard vers les sommets. Jusque là, rien de bien original.

Pour la décoration, il demande conseil à son ami Marie Alain Couturier.

Père dominicain, Marie Alain Couturier a une devise : « tout artiste vrai est un inspiré ». Les deux religieux vont donc inviter les plus grands artistes modernes quelles que soient leurs convictions religieuses ou leurs idées politiques. Un joyau va naître!

C’est ce qu’on va appeler « la leçon d’Assy ». Et quelle leçon… artistique et humaniste. Des dizaines d’artistes vont y prendre part. Voici les oeuvres de quelques-un(e)s.

Fernand Léger conçoit pour la façade une mosaïque de 152m2 autour d’un médaillon avec le visage de la Vierge.

Entrons pour d’autres découvertes étonnantes…

Le choeur est revêtu d’une tapisserie de Jean Lurçat. Le Christ en croix est de Germaine Richier.

Sur la gauche, une lumière jaune… une céramique d’Henri Matisse. La porte du tabernacle, un poisson de Georges Braque

Chagall est là également. Une céramique du baptistère et deux vitraux…

La cuve baptismale est de Carlo Sergio Signori en marbre de Carrare.

Les vitraux des murs et des baies latérales : « L’Archange Saint-Raphaël » Marie-Alain Couturier, « Saint-François d’Assise » Paul Berçot, « Saint-Pierre aux liens » Paul Borny, « Saint-Louis » Maurice Brianchon. Dans la crypte, ceux de Marguerite Huré. Et bien d’autres, le vitrail moderne dans tous ses états!

Mille autres chefs-d’oeuvre à découvrir dans cette église, nés « d’une idée juste » : garder vivant l’art chrétien. Et pour cela, on s’en donne les moyens : « L’art ne vit que de ses maîtres vivants et on prend la vie là où on la trouve et comme elle est »…

À vous d’en découvrir plus sur Internet si vous le désirez. Et pour ceux qui fréquentent la vallée de Chamonix, quittez une demi-journée godasses, crampons, piolet et autres cordes, vous ne le regretterez pas!

Prochaine étape, juste pour pour vos yeux : une autre merveille, c’est le cas de le dire…