À la Place de Baugniet

C’est tout d’abord une friche industrielle comme il y en a tant dans le quartier Longdoz-Grétry malgré l’implantation de la Médiacité. Une friche qui me parle car il y avait là un garage indépendant Citroën où mon mari faisait faire les entretiens de nos voitures. Oui, Citroën, c’était notre passion et le garagiste en question faisait travailler des jeunes en insertion. Tout pour nous plaire.

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Une friche très proche d’un de mes lieux de travail, en bordure de l’arrêt de bus juste avant le mien. De l’autre côté de la rue, une placette à l’intersection des rues Lairesse et Douffet avec une plaque indicatrice qui attira, un jour d’arrêt prolongé du bus, mon attention.

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Au sol, une mosaïque…

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Mais qui est donc ce Marcel-Louis Baugniet, Liégeois de naissance? Vous me connaissez maintenant, il ne n’en faut pas plus pour démarrer un genre d’enquête qui ravit ma curiosité d’historienne !

Un visage

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Dico, mon beau Dico, que me dis-tu de lui?

Marcel-Louis Baugniet (1896-1995) 

Marcel-Louis Baugniet est l’élève de Jean Delville en 1915 à l’Académie des beaux-arts de Bruxelles. Il va se montrer très tôt influencé par Frank Kupka et Albert Gleizes. Dès 1922, il est lié avec le milieu de l’avant-garde belge autour de la revue 7 arts. Son tableau l’Homme du rail (1923) s’apparente par son sujet, ses formes schématiques et sa recherche de l’imagerie populaire aux recherches qui sont faites à la même époque par des artistes tels que Peter Alma ou plus tard Félix Aublet. Dans un style très proche du purisme, il essaye de traduire des sujets empruntés à la vie moderne : Joueur de tennis (1926, Bruxelles, M. R. B. A.). Parallèlement, il exécute une peinture abstraite, marquée au départ par l’œuvre de Kandinsky et de Moholy-Nagy, qui représente la phase wallonne de la tendance constructiviste. Il réalise également à cette époque quelques reliefs. Baugniet s’est tout de suite intéressé aux arts appliqués. En 1925, il dessine les costumes de la danseuse Akarova, réalise des décors de théâtre, s’intéresse à la typographie et crée des pièces de mobilier et des aménagements intérieurs, allant même jusqu’à fonder une entreprise,  » Formes nouvelles « , pour diffuser ses productions. Marcel-Louis Baugniet a repris son activité artistique dans le courant des années 70, en réalisant notamment de nombreux collages. 
 

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Peinture abstraite, certes, mais j’avoue ne pas comprendre le génie de ce style. Pourtant ce projet de tapis…

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Baugniet revint souvent à des expressions plus douces inspirées par le sport, l’art de sa première épouse la danseuse Akarova, ou encore au style de l’affiche…

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Eclectique comme tous les artistes de son époque…

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Mais comme tous les artistes de cette époque aussi, curieux d’art appliqué. Le grand écart depuis l’art nouveau au design presque nordique… Des années 20 jusqu’aux années 70, il balaye une époque incroyable… C’est cette partie de son génie qui me parle, peut-être parce que je me perds des soirées entières dans des catalogues afin de remeubler ma maison !

Des tables, des sièges

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 De la vaisselle, des lampes !

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Régulièrement de très nombreuses expositions, la galerie Quadri aussi située aujourd’hui à Forest…

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Trop petite place, trop confidentielle, trop modeste pour ce grand artiste. À moins qu’il ne soit né dans ce quartier? Partez comme moi à sa découverte ! 

Toute ressemblance…

Le monde est en émoi devant les destructions perpétrées par les fous de Daech. Notre rapport d’occidental à l’art et au patrimoine nous fait nous révulser face à ces iconoclastes. Et pourtant beaucoup de nos ancêtres eurent la même réaction : pensons aux crimes de l’Inquisition et à ses autodafés,  à l’anéantissement des civilisations précolombiennes par la même autorité catholique. Plus près de nous, et avec des convictions tout à l’opposé, les Révolutionnaires français anéantirent bien des châteaux, des églises, étêtèrent statues de rois et de saints. Je vous l’accorde, il y a tout de même 225 ans. Depuis en Europe…

Les participants à la nouvelle émission de Franz Olivier Giesber « Les grandes questions » il y a quelques semaines faisaient le parallèle entre le régime nazi et l’Etat islamiste et en arrivaient à l’expression d’islamo-fascisme. Démonstration sans faille : mêmes méthodes face aux intellectuels rebelles, aux minorités, à la liberté d’expression, à l’art.

Drittes-Reich.jpegCar oui, revenons à l’art et à son anéantissement barbare. Il fut une époque dans l’histoire européenne que les plus anciens d’entre nous ont encore connue : la fin des années 30. En plein XXème siècle, Hitler introduit la notion d’art dégénéré dans les arts plastiques (tout comme en littérature et en musique). Dès 1935, Julius Streicher, le maire de Nuremberg, organise une première exposition sur ce thème. Une deuxième plus importante est organisée à Munich en 1937.  Les oeuvres présentées sont mises en relation avec des productions de malades mentaux pour l’édification des visiteurs, les artistes maudits sont présentés comme des barbouilleurs dégénérés mais aussi de dangereux comploteurs voulant détruire l’art allemand en le contaminant sciemment par cette peinture décadente. Les musées allemands sont « nettoyés », cinq mille oeuvres auraient été détruites et brûlées. Mais Goebbels, amateur d’art et possédant à titre personnel des toiles de ces peintres,  convainc Hitler d’en sauver certaines et d’organiser des ventes aux enchères afin de pouvoir financer la guerre.

C’est ainsi qu’est mise sur pied la vente de Lucerne (terrain neutre) en 1939. Cent vingt-cinq oeuvres ( 108 peintures et 17 sculptures) réalisées par 39 artistes majeurs, provenant des musées allemands, s’apprêtent alors à être écoulées pour remplir les caisses du troisième Reich.

Mis au courant de l’opération, un groupe de Liégeois parvient à réunir l’équivalent de 5 millions d’euros et part à Lucerne avec l’espoir d’acheter dix oeuvres, parmi lesquelles des tableaux de Gauguin (Le sorcier d’Hiva-Oa), d’Ensor (La mort et les masques), de Picasso (La famille Soler), de Chagall (La maison bleue) et un auto-portrait de Van Gogh.

On pourrait s’interroger aujourd’hui sur la valeur morale d’une telle opération. Tout d’abord il y avait urgence à sauver ces oeuvres. Ensuite les participants venus d’Europe et d’Amérique firent un pacte : chacun révéla les tableaux qui l’intéressaient et tous décidèrent de ne pas surenchérir, les oeuvres seraient ainsi acquises au prix plancher réclamé par les nazis, pas un centime de plus. Un seul ne tint pas parole: un amateur américain qui surenchérit face aux Liégeois à propos du Van Gogh et qui emporta le morceau. Il s’agissait du premier tableau de la vente, les Liégeois ne voulurent pas trahir leur serment mais surtout ne pas envoyer un signal négatif pour la suite des événements… L’État belge était aussi représenté et acquit des tableaux pour les musées d’Anvers et de Bruxelles. La vente ne remporta pourtant pas le succès escompté par Goebbels, seules un peu plus de 80 oeuvres trouvèrent acquéreurs, certaines rentrèrent en Allemagne, furent détruites ou disparurent de la circulation, se firent oublier dans les réserves de musées ou atterrirent chez des  marchands d’art comme le tristement célèbre Gurlitt.

Depuis le mois d’octobre et jusqu’au 29 mars, une trentaine d’oeuvres rescapées de cette vente de Lucerne peuvent être admirées à la Cité Miroir dans l’exposition « L’art dégénéré selon Hitler ». La concrétisation de 12 ans d’efforts de l’université de Liège pour convaincre les musées étrangers de prêter ces oeuvres si précieuses.

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On peut y admirer les 9 tableaux liégeois, des tableaux bruxellois (pas tous car un musée de la capitale refusa le prêt…) et anversois (tous! merci, amis flamands!) mais aussi des oeuvres éparpillées dans le monde entier et qu’il a fallu retrouver. Puis pas le plus simple, convaincre les musées de les prêter! Il y a notamment ce tableau de Kokoschka « Tower Bridge », venant du Minneapolis Institute, un des clous de l’exposition car jamais prêté auparavant et sans doute jamais plus avant longtemps.

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Je vous conseille vivement de visiter l’exposition avec un guide (ceux de l’association universitaire Art et Fact sont excellents) car franchement,  il est bien difficile de comprendre à la vue de certaines oeuvres ce qu’on pouvait leur reprocher ! Ici, on découvre un tableau représentant des fleurs à la mode impressionniste, des sculptures d’inspiration chrétienne  (sur la photo ci-dessus à gauche), plus loin un tableau champêtre anodin, presque naïf. Les peintres juifs, communistes, expressionnistes, on l’imagine. Mais certains artistes avaient été soldats de l’armée allemande, héros parfois lors de la 1ère guerre mondiale, d’autres même étaient inscrits au parti. Alors? L’étiquette « art dégénéré » pour la production d’un artiste pouvait tout simplement provenir des fréquentations artistiques ou politiques que celui-ci avait eues dans sa jeunesse, parfois très longtemps avant l’apparition du nazisme, de l’ambiance dégagée par sa production…

imagesCAEDN3TY.jpegLa sanction était inéluctable: interdiction dorénavant de peindre. Certains réussirent à émigrer; Emil Nolde, lui, se tourna vers l’aquarelle et intitula ses productions « tableaux non peints ». 

Très intéressante également, la frise de toutes les oeuvres proposées lors de la vente de Lucerne. Celles qui furent achetées et leur localisation actuelle, celles qui furent acquises plus tard, celles qui ont disparu, celles dont on ne sait plus rien…

imagesCAM77T2P.jpegD’autres infos : http://www.citemiroir.be/sites/default/files/dp-final-fr.pdf

Voici les 9 tableaux de la vente de Lucerne qui font partie de la collection permanente du BAL (musée des Beaux-Arts de Liège). Dès qu’ils auront regagné le musée, vous pourrez même les admirer gratuitement tous les premiers dimanches du mois.

La Maison bleue de Chagall, La Mort et les Masques de Ensor, Le Sorcier d’Hiva Oa de Gauguin, Monte-Carlo de Kokoschka, Chevaux au pâturage de Marc, Portrait de jeune fille de Marie Laurencin, Cavalier sur la plage de Lieberman, Le Déjeuner de Pascin, et La Famille Soler de Picasso.

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Ainsi donc comme l’ont fait les nazis il y a 76 ans, les Islamistes détruisent pour l’endoctrinement des masses populaires et vendent pour financer leur course criminelle vers le pouvoir. Toute ressemblance… hélas!