Usine à gaz…

Si tout comme moi vous rêvez un jour de découvrir Vienne, vous pensez Schönbrunn, Prater, Musikverein, Hofburg, Sachertorte, Palais de la Sécession, Opéra, Danube, gazomètres…

Oups, gazomètres ??? Oui, oui car ceux-là, ils valent vraiment le détour… À la fin de l’article, vous n’aurez plus qu’une envie, la même que moi : courir les découvrir!

Ils ne sont pas tout jeunes, environ 125 ans et ont eu plusieurs vies.

À la fin du XIXème siècle, la ville de Vienne doit faire face à la fin d’un contrat de gaz avec une compagnie anglaise. Pour gagner son indépendance énergétique (déjà!), elle va donc construire une usine à gaz à base de charbon et quatre gazomètres pour le stocker en dehors de la ville, à Simmering. Ce seront pour l’époque les installations les plus grandes d’Europe. Il faudra trois ans pour les ériger et comme ils étaient visibles de la ville, les habitants exigèrent que les cuves soient entourées d’un mur de brique avec fenêtres. On ne transigeait pas avec l’esthétique dans la Vienne de l’époque! Au total, 43 millions de briques, 17 500 m³ de béton utilisés, et 75 000 m³ d’excavation.

Bombardé plusieurs fois pendant de la Seconde Guerre mondiale, le site est resté malgré tout opérationnel grâce au courage des centaines d’ouvriers et d’ingénieurs qui le protégèrent également lors de la reddition des troupes allemandes.

L’usine de Simmering a fourni du gaz de ville aux Viennois de 1898 à 1984, date à laquelle on passe définitivement au gaz naturel. Pas de destruction car heureusement, l’ensemble avait été précédemment classé « repère historique protégé » en 1978. Néanmoins, le démantèlement intérieur a lieu et les enveloppes vides deviennent des sites de concerts des rave party « Gazometer » qu’on peut voir sur Youtube, et des décors de séries allemandes et de cinéma notamment pour le James Bond Tuer n’est pas jouer en 1987.

C’est donc ainsi qu’allait finir ce complexe qui, contre vents, marées et guerres, avait éclairé et chauffé Vienne pendant 80 ans ? Non. Ces monuments fascinants d’une époque révolue réveillent soudain l’intérêt des promoteurs lorsqu’on envisagea de les transformer en hôtels pour une exposition universelle Vienne/Budapest qui ne vit jamais le jour.

Mais l’impulsion salvatrice a enfin eu lieu et naît alors un projet architectural extraordinaire : Les Quatre Cylindres de Simmering.

De 1999 à 2001 va naître la Gazometer City ou G-Town, quatre réalisations de grands architectes sur les gazomètres A, B, C, D.

Le gazomètre A est confié à Jean Nouvel. L’architecte français ne veut pas obstruer l’intérieur de la structure mais plutôt l’utiliser et lui conférer une grande légèreté et une grande luminosité avec du verre et de l’acier réfléchissant. 11 étages résidentiels avec sur chacun 20 appartements. Un espace est resté ouvert entre le mur de brique et les nouvelles constructions permettant de voir la façade du gazomètre de l’intérieur et une coupole en toile d’araignée pour toit.

Le gazomètre B est confié à l’agence d’architecture autrichienne Coop Himmelb(I)au. Sa spécificité est l’adjonction d’une tour penchée, « le bouclier ».

Le gazomètre C échoit à l’architecte autrichien Manfred Wehdorn. Il y crée un lieu typiquement viennois, l’Innhof, dans un style art déco avec un atrium verdoyant.

Pour le gazomètre D, c’est Wilhem Holzbauer également architecte autrichien qui s’y colle. Si on peut dire, car c’est le seul qui se détache de la paroi et installe sa construction en étoile de l’intérieur vers l’extérieur avec au sol un grand jardin.

Les gazomètres accueillent aussi un grand centre commercial qui court dans les sous-sols, des salles de concerts, un conservatoire de musique, des salles de fitness, des bureaux, des bibliothèques. Des passerelles permettent de passer de l’un à l’autre, on se trouve ainsi devant une petite ville parfaitement autonome.

Alors, ces gazomètres, pas envie d’aller y faire un tour lors d’un voyage à Vienne? Moi, j’y courrai avec une belle leçon d’architecture en perspective!

Astérix and Co – 2

2. Le village ! où ça, le village ?

Albert Uderzo, un des papas d’Astérix, était totalement autodidacte et dessinait depuis son plus jeune âge. En 1942, à 15 ans, alors qu’il s’est déjà fait un petit nom en publiant des dessins dans les journaux parisiens, il quitte tout pour rejoindre son frère Bruno réfugié dans la région de Saint-Brieuc pour échapper au STO. Pendant deux ans, il découvre la nature, la mer et les environs immédiats, lui qui ne connaissait que la banlieue parisienne… et il crayonne toujours!

Aussi en 1959 lorsqu’il crée le petit guerrier moustachu, il installe son village dans ce coin d’Armorique (proche d’ailleurs de Corseul, « notre » ancienne ville gallo-romaine).

Ce village gaulois, certains se sont mis en tête de le situer avec exactitude même si Uderzo lui-même disait en être incapable. Leur premier indice : les 3 îles à gauche sous la loupe.

Ce sont « Les Trois Pierres du Cap d’Erquy » (en face de Saint-Brieuc) ! Y figurent encore un corps de garde du système défensif de la Bretagne initié par Louis XVI, avec batteries et corps de garde; et en retrait, le four à boulet d’où on tirait des boulets chauffés à rouge sur les bateaux ennemis. Haut-lieu de résistance donc!

Un peu mince ? Il y a mieux ! Regardez la première vignette de la première page de l’album « Le Domaine des dieux » : 4 autres indices numérotés de 1 à 4 avec photos à l’appui…

  1. le port d’Erquy semble avoir servi de modèle à celui présenté sur la maquette de César.
  2. Le village d’Astérix en surplomb correspond au terrain resté vierge au-dessus de la petite crique voisine et appelé « le camp de César »… Uderzo, venu plus tard sur place, n’en croyait pas ses yeux et se demandait si son subconscient ne lui avait pas joué des tours !!!

Le port d’Erquy

Le Camp de César

Restent à trouver une carrière pour les menhirs d’Obélix, une forêt pour ses sangliers et les herbes magiques pour Panoramix !

3. Nous sommes sur une côte de grès rose ( et non de granit qui est plus loin) avec des affleurements sur les plages mais également la carrière « Les Lacs bleus » visitable par le sentier touristique des Carriers (et remise en activité récemment). On y débardait dès le Moyen Âge d’énormes pierres pour la construction d’édifices de prestige et jusqu’en 1974, des pavés de rue…

Affleurements de grès rose

La carrière « Les Lacs bleus »

4. Et la forêt ? le Chaos d’Huelgoat ! tout proche également de Saint-Brieuc! Les druides le fréquentaient, y cueillant des plantes médicinales dont le lierre, la fougère mâle et bien évidemment le gui! Bien des légendes y courent encore dont une tenace dans le coin : celle d’une boisson énergisante…

Le Chaos de Huelgoat

Que penser de tout cela ? Les habitants y croient dur comme fer : Erquy = le village d’Astérix ! Uderzo, lui, était resté baba devant tant de coïncidences. Et vous ? Bizarre tout de même, non ?

Astérix and Co – 1

I. Irréductible Gaulois ?

Fasciné par Jules César, l’Empereur des Français Napoléon III (1808-1873) entreprit d’en écrire la biographie. Très vite, la période de la Guerre des Gaules devint le vrai sujet du 2ème tome paru en 1866. Sur le terrain, Napoléon III agit en novateur, finançant personnellement la recherche des traces archéologiques avec l’aide des meilleurs spécialistes. S’en suivirent bien des découvertes. Du coup, l’intérêt pour la Gaule se propagea : les Gaulois devinrent un thème culturel à la mode et Vercingétorix, un héros romantique. Lors de la guerre de 1870, tout se teinta de patriotisme exacerbé : les Romains = les Prussiens, César = Bismarck, Vercingétorix = Gambetta, le battu plein de panache et revanchard.

Naît ainsi l’irréductible Gaulois : le Français en général, mais surtout l’Alsacien, le Lorrain et les Poilus de la 1ère Guerre mondiale dont les cigarettes s’appelleront « les Gauloises ». À l’école de la Troisième République, c’est le fameux et parfois incongru « Nos ancêtres les Gaulois« !

1959, apparition d’Astérix, le petit guerrier moustachu qui va remettre le mythe au goût du jour. Avec humour, les auteurs présentent des Gaulois farouches qui ne se rendent pas et qui finissent par gagner. L’Armorique est leur base de résistance.

Qu’en fut-il vraiment ? Certes, il y eut de sanglantes révoltes et des déportations, mais le temps d’une génération aura suffi pour que la plupart des élites gauloises deviennent gallo-romaines, richesse économique oblige. Voyons voir !

Bretagne d’aujourd’hui : Corseul-la-Romaine. Lieu déjà mentionné par César, l’oppidum de la tribu des Coriosolites fut sous Auguste transformé pour des raisons économiques en « Fanum Martis », une ville gallo-romaine de plus de 6000 habitants au carrefour des routes vers Rennes (Condate) Tours (Caesarodunum), Le Mans (Vindinum) et les cités portuaires.

De nombreux vestiges et un archéoforum. Puisque « Fanum Martis », il y a un Temple de Mars ; le bâtiment le plus grand et le plus haut de la Bretagne romaine construit selon un plan de Vitruve de 5000m² pouvant contenir 2000 personnes lors des cérémonies religieuses. Le Champ Mulon avec sa villa romaine, sa domus et son centre thermal ; le jardin des Antiques, son quartier commercial et ses insulae le long de la via romana (la départementale d’aujourd’hui) donnant sur un forum aujourd’hui recouvert ; la stèle de la Carthaginoise Silicia Namgidde venue rejoindre son fils marchand et morte à l’âge de 65 ans ; une nécropole…

Cette importante cité gallo-romaine se développa donc comme toutes les autres villes alentour de la province La Lyonnaise comme l’indique la carte ci-dessus. Donc pas d’irréductibles gaulois ici!

(Lors des invasions germaniques, elle se dépeupla, devint le lieu-dit Coriosolis en souvenir de la tribu gauloise puis Corsolt avec un château médiéval d’où le « Corseul » d’aujourd’hui faisant partie de la communauté de Dinan.)

On remarque sur une carte actuelle qu’elle est proche du cap Fréhel et du cap d’Erquy, c’est là que nous attendra Astérix!